En 1828, la tournée provinciale de Lafayette réhausse sa popularité et le camp libéral le considère toujours comme une figure majeure, notamment au sein de la société Aide-toi, le ciel t’aidera qui rassemble Guizot, Rémusat, Lanjuinais, Carrel, Tracy, et bien d’autres. A Paris, le pouvoir restaurateur de Charles X est fragile et nourrit malgré lui de nombreuses conspirations. L’une d’elles, surnommée « Conspiration Lafayette » de l’Association de Janvier, proche de la charbonnerie, est dévoilée, sans conséquences.
Il n’est pas trop tôt de mars pour débuter les soubresauts de 1830. Le 16, Lafayette signe l’« Adresse des 221 » qui affirme que le pouvoir ne respecte plus la Charte et réclame des changements d’appareils politiques. Le discours de Lafayette du 4 mai entrevoit et soutient les mouvements d’opposition grandissants. Le 16 mai, la Chambre est dissoute par le roi et Lafayette est triomphalement réélu député de Meaux. En réaction à l’agitation, Charles X publie les ordonnances royales : suspension de la liberté de la presse, dissolution de la Chambre, retour au système électoral précédent, appel à de nouvelles élections. Le député et banquier Laffitte rassemble chez lui au château de Maisons l’ensemble des libéraux. Il pousse pour que les Orléans remplacent les Bourbons. la tournée provinciale deLafayette se rend à Paris quand démarre le refrain des barricades.
Les émeutes atteignent leur paroxysme lors des journées des 27, 28 et 29 juillet, les « Trois glorieuses ». Charles X tente une dernière parade en remplaçant Polignac, le chef du gouvernement, l’homme de la contre-révolution, mais il est trop tard. Lafayette se retrouve placé en tête de cette révolution et reprend le commandement de la Garde nationale. Il est alors le tenant de la République face à la monarchie. S’il la proclame, il en deviendrait le légitime président. Le 31 juillet 1830, la rencontre de Lafayette et de Louis-Philippe, le duc d’Orléans, donne lieu à une scène mémorable sur le balcon de l’Hôtel de ville : le duc d’Orléans, une main sur le drapeau national, embrassé par Lafayette. Cette scène suffit à porter Louis-Philippe au pouvoir. La monarchie constitutionnelle advenait. La Charte de 1830 sera adoptée le 7 août.
« Vers sept heures, on avait entendu les coups de fusil tirés dans la rue du Lycée, et les feux de peloton de la rue Saint-Honoré. Aussitôt, les élèves s'étaient réunis dans la salle de billard, et, là, ils avaient décidé que quatre d'entre eux seraient envoyés à Laffitte, à La Fayette et à Casimir Perier, pour leur annoncer la disposition de l'Ecole [polytechnique], et leur dire que les élèves étaient prêts à se jeter dans l'insurrection. »
« J'ai déjà dit que je connaissais le général La Fayette. Je tentai ce qu'avaient inutilement essayé Charras et les élèves de l'Ecole – de lui faire une visite.
J'allai chez lui. On me répondit qu'il était sorti ; j'en doutai d'abord. J'entrai dans la loge du concierge ; je me fis reconnaître. Mais l'honnête portier me répéta ce qu'il m'avait déjà dit à travers son petit carreau.
Je m'en allais fort désappointé, lorsque je vis venir, au milieu de l'obscurité, trois ou quatre hommes à pied. Dans celui du milieu, je crus reconnaître le général.
Je m'avançai. C'était lui. Il rentrait appuyé au bras de M. Carbonnel. M. de Lasteyrie, je crois, venait derrière, causant avec un domestique.
- Ah ! général, m'écriai-je, c'est vous !
Il me reconnut.
- Bon ! me dit-il, cela m'étonnait de ne pas vous avoir vu encore.
- C'est que vous n'êtes pas facile à voir, général.
Et je lui racontai tout ce qu'avaient fait, pour arriver à ce résultat, Charras et ses amis.
- C'est vrai, dit-il, j'ai trouvé leurs noms, et j'ai recommandé qu'on les reçût s'ils revenaient.
- Général, je ne sais si les autres reviendront, mais je doute que Charras revienne.
- Et pourquoi cela ?
- Parce qu'on m'a dit qu'il avait été tué du côté de la Grève.
- Tué ? fit-il. Ah ! pauvre jeune homme !
- Il n'y aurait rien d'étonnant, général... Il y faisait si chaud !
- Vous y étiez ?
- Mais oui !... seulement, je n'y suis pas resté longtemps.
- Et que comptez-vous faire demain ?
- Je vous avoue, général, que c'est la question que j'allais vous adresser.
Le général s'appuya sur mon bras, et fit quelques pas en avant, comme pour échapper à la surveillance de ses deux compagnons.
- Je quitte les députés, dit-il ; il n'y a rien à faire avec eux...
- Alors, pourquoi ne faites-vous pas tout seul ?
- Qu'on me fasse faire, dit le général, et je suis prêt.
- Puis-je répéter cela à mes amis ?
- Vous le pouvez.
- Adieu, général ! Il me retint par le bras.
- Ne vous faites pas tuer...
- Je tâcherai.
- En tout cas, que les choses tournent d'une façon ou de l'autre, faites en sorte que je vous revoie.
- Vous pouvez en être sur, général, à moins que...
- Allons, allons, dit le général, au revoir !
Et il rentra chez lui. »
Alexandre Dumas, Mémoires, chapitres CXLVII - CXLVIII
« La Fayette répondit à la députation à peu près la même chose qu’il m’avait dite la veille au soir :
- Mes amis, si vous me croyez utile à la cause de la liberté, disposez de moi.
Et il se remit aux mains de la députation.
Le cri de « Vive La Fayette ! » retentit dans les salons de Laffitte, et se prolongea dans la rue.
La Fayette, se retournant vers les députés :
- Vous le voyez, messieurs, dit-il, on m’offre de prendre le commandement de Paris, et je crois devoir accepter.
Ce n’était pas le moment d’être d’un avis contraire ; l’adhésion fut unanime.
Il n’y eut pas jusqu’à M. Bertin de Vaux qui ne s’approchât de La Fayette pour lui offrir quelques paroles de félicitation que je n’entendis pas.
J’étais déjà dans l’antichambre, dans la cour, dans la rue, criant :
- Place au général La Fayette, qui se rend à l’hôtel de ville !
L’unanimité des cris de « Vive La Fayette ! » prouva que l’homme de 1789 n’avait pas perdu, en 1830, un atome de sa popularité. Sam Gellaitry - Assumptions
La belle chose que la liberté, et comme c’est bien la déesse immortelle et infaillible ! La Convention passe, le Directoire passe, le Consulat passe, l’Empire passe, la Restauration passe, têtes et couronnes tombent ! et l’homme que la liberté a sacré roi du peuple en 1789 se retrouve roi du peuple en 1830 »
Alexandre Dumas, Mémoires, chapitre CLI
J. Lafitte, Casimir Perrier, général Lafayette, comte Gérard Paris Musées/Musée Carnavalet
Le général Lafayette,
Paris musées/Musée Carnavalet
Attaque et prise du Louvre
Ambulance des blessés
Le duc d’Orléans embrassant
le général Lafayette,
Paris
musées/musée Carnavalet
Profil de Lafayette en César, 1830
Assiette représentant Lafayette sur
les barricades de 1830, avec en légende
un extrait de "la Parisienne", chanson
de Casimir Delavigne
Coffret complet du jeu des
héros de la Révolution de
Juillet 1830
Bague à l’effigie de Louis-Philippe, avec couvercle ouvrant sur une chaînette de six médaillons souvenirs des journées de juillet
Scène des journées de Juillet, par Ary Scheffer
Le 9 août 1830, serment du roi, séance de la Chambre des députés